Il était une fois, la rue de Paris au Havre. 6 (suite et fin)
La reconstruction du Havre peut se résumer schématiquement en trois étapes, d’abord le déblaiement des ruines, ce que nous avons vu dans le précédent chapitre. Dans le même temps ingénieurs, géomètres, urbanistes, s’emploient à concevoir un plan d’ensemble pour la reconstruction du Havre.
Félix Brunau sur un plan du Havre. © Thérèse Bonney.
En 1946 Pierre voisin maire du Havre assisté de Félix Brunau architecte de la ville, présente aux Havrais un plan de reconstruction élaboré par Henri Colboc. La presse s’en fait l’écho bien que le MRU1 ne l’approuve pas.
Le ministère2 avait choisi celui d’Auguste Perret en 1945 mais ne l’avait pas retenu officiellement.
1 Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme.
2 Il n’y eut pas moins de 7 ministres de la reconstruction entre 1944 et 1947.
Auguste Perret 1874 – 1954. © AFP
Le plan de Perret prévoyait de reconstruire Le Havre sur une immense dalle de béton où toute la circulation des véhicules techniques serait souterraine.
La municipalité le refuse invoquant le coût prohibitif de cette dalle. De plus la pénurie de ciment à l’époque aurait retardé la reconstruction du Havre.
Joseph Marrast, inspecteur général de la reconstruction en Normandie, conduit les négociations entre la municipalité du Havre et le MRU. Après divers compromis des deux côtés, elle aboutit à l’application du plan de Colboc pour Saint-François, et celui d’Auguste Perret pour le centre-ville.
A gauche le projet de reconstruction du Havre présenté à la presse le 2 mars 1946.
A droite le plan définitif de la reconstruction du Havre. Le cercle bleu indique l’endroit où a été posé la première pierre. Le trait rouge figure la rue de aris. © Collection Dan.
A gauche le projet de reconstruction du Havre présenté à la presse le 2 mars 1946.
A droite le plan définitif de la reconstruction du Havre. Le cercle bleu indique l’endroit où a été posé la première pierre. Le trait rouge figure la rue de Paris. Collection Dan.
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La deuxième étape, plus symbolique celle-ci, est la pose de la première pierre le 31 mars 1946, en présence du ministre de la reconstruction François Billoux, du préfet de la Seine Inférieure Jean Mairey et du maire du Havre Pierre Voisin.
Face à l’Hôtel de Ville en ruines, les personnalités sur l’estrade pour les discours et la pose de la première pierre de la reconstruction. La scène se passe à l’encoignure des rues de Paris et Jules Siegfried. © Raoul Friboulet.
A gauche François Billoux ministre de la reconstruction. Il introduit le parchemin dans l’urne qui sera scellée dans la première pierre. A droite Pierre Voisin, maire du Havre pendant son discours. © BMH fond Bernard Esdras-Gosse.
Les personnalités après la cérémonie descendent la rue de Paris. © BMH fond Bernard Esdras-Gosse.
La troisième étape est la reconstruction par elle-même. Un travail considérable de terrassement commence, camions, pelleteuses, bulldozers, rouleaux compresseurs etc, se mettent à l’œuvre pour construire ou reconstruire les rues Havraises tel que les géomètres les ont délimitées. C’est une noria de camions qui n’ont de cesse de déverser des matériaux sur toutes les « nouvelles » artères Havraises et notamment la rue de Paris.
Le nouveau tracé de la rue de Paris fait, il restait à réaliser toutes les conduites souterraines : égouts, canalisations d’eau, de gaz, d’électricité etc.
Photo IGN de 1947. En rouge l’ancienne rue de Paris, en bleu son nouveau tracé avec les tranchées où seront posées les différentes conduites et canalisations, bien visibles ici. © IGN.
En arrière-plan la rue de Paris au début des travaux avec les camions de terrassement. Au premier un ingénieur (?) et sa Simca 5. © Raoul Friboulet.
La nouvelle rue de Paris, tout est prêt pour la reconstruction. A droite une des cantines municipales qui permettra à tous ceux travaillant à la reconstruction de prendre leur repas non loin des chantiers. © Nicéphore.
Sur la photo de gauche le photographe est au niveau du « X » de la photo actuelle. Il a devant lui l’amoncellement des gravats qui ont permis l’élévation du niveau de la rue de Paris avec au loin l’église Notre Dame. © Bibliothèque Municipale.
La construction du V 36. 1 = Jardins de l’Hôtel de Ville. 2 =rue du Chilou aujourd'hui disparu à sa place l'extension du V36 non encore construit sur cette photo. Le nom "Chilou" sera redonné à une place proche. Au fond la rue de Paris. AMH 47Fi0100.
Et puis, petit à petit le « nouveau » Havre commence à se construire. Sur la rue de Paris plusieurs chantiers et immeubles sortent de terre, parmi les entreprises ayant contribué à cette reconstruction on trouve principalement Thireau Morel.
1953, le front de mer sud sort de terre © Raoul Friboulet, à droite le même endroit de nos jours © Dan.
L’hiver 1954-55 a marqué Le Havre qui s’est couvert d’un manteau blanc interrompant les travaux de reconstruction. Sur la gauche le N 29 et le N 30 derrière l’église Notre Dame en restauration. © Raoul Friboulet.
A gauche la rue de Paris est en cours de finition, son enrobage arrive jusqu’au N 29 AMH 47Fi0151. A droite, dans la mesure du possible le même endroit de nos jours. © Nicéphore.
La construction du V 57. © Nicéphore.
Dans les années 1960 la rue de Paris était redevenue une artère fréquentée par les touristes et les promeneurs, comme l’atteste ce petit train touristique qui la parcourait.
Le petit train touristique stationné devant la place Gambetta avant d’embarquer les touristes. Collection Dan.
De nos jours la rue de Paris sert de cadre aux fêtes les plus diverses, comme le corso fleuri. L’une de ces festivités a marqué les Havrais en 2017 pour les 500 ans du Havre, la venue de la troupe « Royal de luxe » et son géant. Cette attraction a enchanté des milliers de Havrais, mais pas seulement.
La foule autour du « géant » rue de Paris le 8 juillet 2017. Photo Dan.
Laissons le dernier mot à Auguste Perret lui-même qui a dit :
“Ce que je veux, c'est faire quelque chose de neuf et de durable. Puisque nous sommes à zéro, il faut en profiter pour partir sur des bases nouvelles qui permettront de faire face à l'avenir de grande ville et de grand port que Le Havre a devant lui”.
Auguste Perret 1945.
Ainsi se termine (provisoirement) l'histoire de la rue de Paris.
Sources :
Principalement les journaux de l’époque : Havre Eclair & Havre Libre.
Compte rendu du conseil municipal du 26 septembre 1945 avec Auguste Perret.
Les Bâtisseurs. Editions Point de vues. Musée Malraux 2002.
Crédit photos :
Raoul Friboulet
Bibliothèque municipale Armand Salacrou.
Archives Municipale du Havre
Nicéphore.
Merci de votre visite.