Le château du Camp Dolent par Françoise Lefort.
Aujourd’hui Havrais-Dire donne la plume à Françoise Lefort, elle nous raconte l’histoire du château du « Camp Dolent ». Certes ce n’est pas au Havre, mais c’était la résidence d’un maire du Havre Jules Ancel, alors…
Le château du Camp Dolent
On connaît la famille Ancel au Havre tant pour son rôle en politique qu’en affaires. L’ancêtre, Daniel, né en 1759, négociant fortuné, détient un beau patrimoine foncier au Havre mais aussi à la
campagne, entre autres à Gonfreville-l’Orcher. Il y est propriétaire de terres au hameau du Camp Dolent.
Son fils Pierre meurt à l’âge de 27 ans en 1813, un an après la naissance de son fils Daniel Édouard, connu sous son troisième prénom, Jules.
Le petit orphelin passe donc beaucoup de temps avec son grand-père qui façonne l’esprit de Jules aux belles et rudes affaires Havraises et l’emmène le dimanche aux champs d’Orcher pour
profiter des délices du grand air et du beau plateau aux superbes récoltes.
C’est sur ces terres d’Orcher, au Camp Dolent, qu’était est situé le château, propriété des Ancel.
Selon les différents plans, le château (tout au moins une imposante demeure), existait déjà au tout début du XIXe siècle. Sans doute a-t-il été remanié ou amélioré au fil des décennies, mais sa
structure de base reste globalement inchangée jusqu’à sa destruction. La parcelle sur laquelle il est construit existait déjà à l’identique au XVIIIe siècle.
La famille Ancel a donc vécu dans ce château, probablement entre la moitié du XIXe siècle et 1911, date du décès de son dernier occupant, Raoul Ancel, maire de Gonfreville-l’Orcher.
Après sa mort la propriété sera louée comme villégiature à des particuliers et à la JOCF (Jeunesse ouvrière chrétienne)
En 1928 la moitié de la toiture du château, alors loué, est détruite par un incendie ainsi qu’une partie du premier étage. Ils ne seront jamais reconstruits. Une terrasse remplacera les parties manquantes des premiers et deuxièmes étages.
Saccagé par les allemands, partiellement déboisé, le domaine est également mis à mal par les troupes américaines qui en poursuivent le déboisement. La comparaison entre 1939 et 1946 est
significative de ce point de vue. Ci-dessous le domaine en 1939 puis en 1946. Le château est
encadré en rouge.
Après les hostilités, le Château, alors propriété de Marie-Claire Jahan, née Ancel, est loué en 1946 à la famille Dubuc, agriculteurs. Une location qui devait être provisoire mais durera jusqu’en 1971.
La construction de la future zone commerciale entraîne l’expropriation des terres du plateau du Camp Dolent et la destruction du château lui-même. Il est définitivement rayé de la carte, sacrifié au profit du bricolage, en 1983.
Sur la vue aérienne ci-dessous l’encadrement bleu correspond au domaine du Camp Dolent.
Les flèches indiquent trois pins en bordure de la propriété. Il n’en reste aujourd’hui qu’un seul.
Le pin toujours en place est situé sur le rond-point menant à Castorama. Du trio initial, le premier est tombé lors d’une tempête, le deuxième a été abattu lors de la construction du parking de Castorama. Pour voir cet emplacement, cliquez sur la photo ci-dessous.
Les Dubuc au château du Camp Dolent
Suzanne, Henri Dubuc et leur fils Lionel vivent au château du Camp Dolent dès 1946. Ces
gonfrevillais, ont perdu leur ferme du Chemin Vert durant la guerre, incendiée par les
bombardements allemands. Relogés au château, ils en exploitent les terres jusqu’en 1960 date à
laquelle Lionel et son épouse Denise leur succèdent. Les deux familles occupent alors le château chacune par moitié. Le parc bien que déboisé pendant la guerre a gardé des cerisiers, des
châtaigniers et trois pins situés au bout du terrain ainsi qu’une grange et un hangar. Le grain est stocké sous les terrasses du château. De quoi régaler rats et souris !
À eux seuls, Lionel et Denise Dubuc exploitent 42 hectares, ont une vingtaine de vaches, des veaux et cultivent blé, betteraves, lin, orge, colza. Une vie rude et besogneuse. Mais en 1971, en prévision de la construction de Castorama, ils sont expulsés du château, relogés dans une maison proche. Un départ brutal, sans ménagement. Les bulldozers débarquent, il faut déplacer le bétail en urgence. Fin janvier 1983, autre coup de massue, c’est l’expropriation et deux mois pour quitter les lieux. Le bétail est vendu le 28 février, la famille quitte le Camp Dolent. Peu de temps après le château est
détruit.
Les Ancel et le château du Camp Dolent
Chronologie des Ancel sur cinq générations :
Daniel Denis Ancel 1759-1837
Pierre Charles Daniel Ancel 1786-1813
Daniel Édouard Jules Ancel 1812-1905
Raoul Ancel 1846-1911
Georges Ancel 1870-1960
Témoignages :
Denise Dubuc - Daniel Palfray.
Sources : Journal Le Petit Havre. - Colloque sur la famille Ancel MHAD
Françoise Lefort
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