L'Arsenal du Havre (4 suite et fin)
Malgré sa disparition, l’histoire de l’arsenal n’est pas terminée pour autant. Un homme, au caractère bien trempé, fera en sorte que tout ce qui rappelle l’ancien Havre soit conservé, l’arsenal, ou ce qu’il en restait, en fait partie.
Georges Priem, puisque c’est lui dont il est question ici, est né à Dunkerque en 1896 et décédé au Havre en 1980. Professeur au lycée technique et passionné par Le Havre, il obtient en 1942 l’autorisation d’emmener ses élèves dans les quartiers évacués (Notre-Dame & St François). Sur place il leur fait dessiner entièrement ou en détails, l’architecture des maisons condamnées.
La rue de la Gaffe murée et aux maisons condamnées dans le quartier Notre-Dame. © CNRS Persée.
Georges Priem 1896-1980. © Collection privée.
En 1943 il devient officiellement inspecteurs des fouilles au Havre, fonction qu’il conservera après-guerre. C’est à ce titre qu’il intervient en 1944 pour le dégagement des décombres qui, selon lui, est fait un peu n’importe comment. Il veut pouvoir donner son avis avant tout déblaiement. Dans ce but il fait coller des affichettes sur les éléments à conserver provenant d’édifices remarquables. Bien sûr parmi eux on retrouve ceux de l’arsenal.
Probablement une des affichettes (entouré en rouge) que Priem a fait coller sur les ruines de l’arsenal. © Raoul Friboulet.
Les pierres de l’arsenal sont donc récupérées et entreposées « quelque part » dans Le Havre mais Georges Priem n’avait pas précisé où ?
Elles n’étaient pas oubliées mais conservées sans aucune indication dans le tunnel Sainte Marie. Ce dernier étant désaffecté depuis 1942(1).
Des recherches sur leur origine sont effectuées dans les années 2010 par Thierry Vincent. Ce dernier Attaché de conservatoire du patrimoine de la ville du Havre, résout cette énigme au bout de 7 ans d’études.
Une enquête plus récente, (sans corrélation avec la première), faite par Aline Lemonnier-Mercier, aboutira à la même conclusion.
Les pierres avaient subi des altérations avec le temps et rendait leur identification délicate. Ci-dessous deux comparaisons entre les clichés de l’arsenal des pierres elles-mêmes.
(1) Tunnel que l’association A.S.P.H (Association de Sauvegarde du Patrimoine Havrais) fait revivre et visiter aux touristes depuis 2019. ici
Détails de la façade. Encadré en rouge un détail de la frise, et en bleu ce que l’on nomme la proue elle représente l’avant d’un bateau. © MAH & Dan.
Autre détail de la façade, la flèche désigne un même élément, celui-ci représente un cadran, sans doute celui d’une boussole. © MAH & Dan.
L’histoire de l’arsenal s’achève ici, mais si vous le souhaitez, vous pouvez assouvir votre curiosité en visitant le tunnel Sainte Marie (2), où, en plus de l’excursion, vous y verrez les pierres de l’arsenal. Ce n’est pas si souvent au Havre que l’on peut contempler un monument, ou ce qu’il en reste, datant du 18ème siècle.
(2) quand cela sera possible, cet article a été écrit le 19 novembre 2020 pendant le second confinement.
Le tunnel Sainte Marie avec les restes de l’arsenal (tout n’est pas visible sur ce cliché) © Havrais-Dire A.S.P.H.
Pour terminer, un « avant-après », mais ici nous partons de 1947 avec une vue aérienne du Havre couplée à une vue de 2018. Cette juxtaposition nous permet de situer l’emplacement de l’arsenal dans le Havre d’aujourd’hui.
En observant la photo de 1947 on se rend compte de l’affaissement des quais du bassin du Roi provoqué par les bombardements, mais également du changement de la trame des rues dans ce secteur. © IGN et Google Earth.
Sources :
Aline Lemonnier-Mercier. Docteur en histoire de l'art.
Thierry Vincent Attaché de conservatoire du patrimoine de la ville du Havre.
Patrice Gourbin : Découverte et protection du patrimoine ancien du Havre N° 91 2001.
Georges Priem : Notes sur l’ancien arsenal de marine et le bassin du Roi. (Recueil de l’Association des amis du Vieux Havre 1933).
Pierre Frissard : histoire du port du Havre 1837.
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