Le Havre. La fabrique d’eaux gazeuses d’Alfred Courtin.
Alfred Courtin. Coll F. Desenclos
Le Havre comptait 6 producteurs d’eaux gazeuses en 1874. En 1884 apparait un autre fabricant, Pierre Théodule Courtin au 7 boulevard de Strasbourg. (L’actuelle avenue Foch). Il s’établit ensuite au 18 rue Béranger comprenant usine et habitation.
À gauche Pierre Théodule Courtin, le père d’Alfred, et ses employés devant le 18 de la rue Béranger. Coll F. Desenclos.
Sa société fabrique des eaux gazeuses composées d’eau de Seltz artificielle, autrement dit de l’eau plate ou minérale auxquelles on ajoute du gaz carbonique. Cette eau est introduite sous pression dans une bouteille appelée, carafe bouchée par un siphon avec bec verseur. Ce commerçant vend également diverses boissons tels que sirops ou limonades.
En 1914, Pierre Théodule Courtin vend l’entreprise familiale à son fils Alfred capitaine au long cours. Ce dernier reste néanmoins dans la marine marchande jusqu’en 1918. C’est sa femme, Jeanne qui veille à la bonne marche de la société pendant que son mari est en mer.
À gauche Pierre Théodule Courtin et son fils Alfred devant le 18 de la rue Béranger. Coll F. Desenclos.
Comme cela se faisait beaucoup à l’époque, l’entreprise Courtin avait ses propres siphons gravés à leur nom comme celui-ci :
Alfred Courtin et un siphon au nom de son entreprise. Coll F. Desenclos.
Cette entreprise se trouvait donc dans la rue Beranger. Cette artère rectifiée lors de la reconstruction, il est impossible de se positionner au même emplacement que le photographe d’avant-guerre.
Le point bleu représente le 18 rue Beranger d’avant-guerre, le point rouge celui d’aujourd’hui. © Plan Jean-Paul Dubosq. Le, Havre 1940-1944. Tome I & II
Néanmoins et juste par curiosité, voici le « nouveau » numéro 18 rue Beranger.
Le 18 rue Beranger de nos jours. © Dan.
Remplir des siphons sous pression n’est pas sans risque, ainsi dans le Journal du 27 aout 1918 à la rubrique Faits Locaux, peut-on lire : Mlle Marthe BERTIN, âgée de 15 ans, demeurant rue Gustave-Flaubert, 90, en travaillant chez M. COURTIN, fabricant d’eaux gazeuses, rue Béranger, 18, a été victime de l’éclatement d’un siphon. Un des fragments de verre l’atteignit à la gorge et lui fit une profonde blessure qui nécessita son admission à l’Hospice Général.
Une carte postale de cette époque représente un des ateliers de fabrication de l’entreprise Courtin.
L’atelier de fabrication 18 rue Béranger. Coll Frédéric Desenclos.
Cet établissement Havrais d’eaux gazeuses avait une spécialité, la « Supra-Soda » au nom de « Avionnette » Cette boisson avait obtenu plusieurs récompenses à l’exposition internationale de Paris en 1912. Par la suite Alfred Courtin utilisera ces distinctions dans sa publicité.
Une affichette publicitaire d’Alfred Courtin. Coll Frédéric Desenclos.
L’entreprise continue son activité jusqu’en 1941 où un bombardement détruit l’usine. L’habitation quant à elle n’est pas touchée. De même en septembre 1944, malgré les énormes destructions dans le voisinage, la maison familiale reste debout. On peut constater avec la photo IGN de 1945 les dégâts qu’a subi ce quartier, le rond rouge indique le 18 rue Beranger.
Le 18 entouré d’un cercle rouge. Le trait bleu représente le boulevard Foch devenu avenue en 1952. © IGN 1945.
La femme d’Alfred Courtin Jeanne écrira à sa fille Jacqueline ce qu’elle a enduré pendant ces bombardements :
« …Après un effroyable bombardement dans la nuit du 14 au 15 juin…nous avons bien cru notre dernière heure arriver… Nous sommes bien en vie au milieu des décombres, sans une égratignure, la maison a tenu bon, plus de toiture, de vitres nulle part, les portes arrachées… Nous étions au bas de l’escalier, pivot de la maison et avons profité d’une accalmie pour filer au refuge Lafaurie, nous avions des ailes, ils sont revenus l’heure d’après, pas un coin de la ville épargné. Tout le quartier du Perrey, des Halles, la place Gambetta, le théâtre brûle encore…j’ai descendu hier 22 seaux de verre cassé et il reste à ramasser tous les plafonds effondrés… ».
La maison sera néanmoins rasée lors de la reconstruction du fait du remembrement et du nouveau tracé de la rue Beranger.
Pour clore cet article voici une dernière photo de Pierre Théodule Courtin en compagnie d’une autre partie de son personnel. Sans doute aimait-il se faire photographier devant son entreprise…
À gauche Pierre Théodule Courtin, et ses employés devant le 18 de la rue Béranger. Coll F. Desenclos.
Un grand merci à Frédéric Desenclos pour avoir fourni photos et historique de cette entreprise.
Sources :
Frédéric Desenclos.
Compléments :
Annuaires Micaux de différentes années.
Annuaire du commerce 1862-1874-1884-1891.
Crédit photos :
Collection Frédéric Desenclos.
IGN.
Dan.
Plan :
Jean-Paul Dubosq. Le, Havre 1940-1944. Tome I & II.
Merci de votre visite.